Le système nerveux entérique[1] (entérique pour intestinal) est réparti le long du tube digestif. Il est formé de plusieurs centaines de millions de neurones (jusqu’à 500 millions pour certains). D’un point de vue embryonnaire, ces cellules nerveuses ont la même origine que celle du « cerveau principal ». A un certain moment, elles s’en séparent et migrent vers le ventre pour former le système nerveux entérique.
Ce système est composé de deux réseaux nerveux complexes. On retrouve aussi les mêmes neurotransmetteurs (molécules chimiques qui assurent la transmission des messages d’un neurone à l’autre) que dans le système nerveux central, comme la sérotonine.
Le système nerveux entérique fonctionne de manière autonome, tout en étant en interaction avec les autres centres nerveux et notamment avec le système nerveux central via le nerf vague (parasympathique). Ce dernier véhicule un courant permanent entre le cerveau et l’intestin.
Le système nerveux entérique commande le péristaltisme, c’est-à-dire les contractions qui assure le transit en se propageant d’un bout à l’autre du système digestif. Il contrôle également la barrière épithéliale intestinale qui doit permettre le passage des nutriments tout en empêchant le passage d’agents pathogènes ou toxiques dans le corps. Il concentre ainsi une grande partie des cellules du système immunitaire et entretient donc une relation étroite avec ce dernier.
Il existe 4 grandes voies de communication entre cerveau et intestin [2]:

C’est Michael Gershon[3] qui évoqua pour la première fois le concept de deuxième cerveau. La digestion étant un phénomène très complexe, il explique le fait que de délocaliser le cerveau en périphérie est plus efficace car de cette façon, le cerveau n’a pas besoin d’être connecté à l’intestin avec des câbles géants et n’a pas non plus besoin de grossir de plusieurs millions de neurones supplémentaires. [4]
En fait, d’après Michel Neunslist[5], ce système nerveux entérique est le premier cerveau ou cerveau original, car à l’origine des espèces, nous n’étions « que des tubes digestifs ». L’évolution a donc fait naître un autre cerveau qui est celui que l’on connaît.
Comme nous l’abordions précédemment, nous retrouvons ici la sérotonine, un des neurotransmetteurs du cerveau. Celle-ci rythme notre transit intestinal, régule le système immunitaire, mais est aussi la molécule du bien-être. 95% de la sérotonine de notre corps est produite dans notre ventre. Elle agit au niveau du tube digestif et est libérée dans le sang pour agir dans l’hypothalamus. Le ventre est donc capable d’impacter la manière dont nous fonctionnons et peut changer la façon dont on perçoit le monde. Notre capacité à penser de manière positive peut-être influencée par les messages envoyés par notre ventre au cerveau.
A contrario, des troubles digestifs sont très fortement corrélés à des troubles émotionnels.[6]. Il a été montré qu’une régulation de notre microbiote intestinal (correspond aux milliards de bactéries à l’intérieur de notre intestin) grâce à une bonne alimentation agit sur le stress [7] et peut traiter les symptômes d’anxiété. [8]
De plus, d’après Bruno Bonaz[9], si l’intestin envoie des signaux gênants au cerveau qui le perçoit de manière intolérable, l’information sera mise dans l’inconscient. On sait par ailleurs que le rêve, révélateur de l’inconscient est sensible à la sérotonine, ce qui va dans le sens de ce mécanisme.
[1] Gros Alexandra, L’image de la semaine: «Le ventre, notre deuxième cerveau», article blog CNRS,
URL : https://lejournal.cnrs.fr/nos-blogs/aux-frontieres-du-cerveau/limage-de-la-semaine-le-ventre-notre-deuxieme-cerveau consulté le 20/01/2020
[2] Le microbiote allié de notre cerveau, Science et Avenir, 2016, URL: https://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/le-microbiote-allie-de-notre-cerveau_105135
[3] Gershon Michael D., neurobiologiste américain de l’Université Columbia (New-York).
[4] Le ventre, notre deuxième cerveau, Documentaire ARTE France, Inserm, Scientifilms, 2013
[5] Neunslist Michel, chercheur à l’INSERM de Nantes.
[6] Troubles émotionnels et maladies inflammatoires de l’intestin, 2012, URL: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22811232/ (traduction française)
[7] Comportement au stress induit par l’exercice, axe intestin-microbiote-cerveau et régime alimentaire: une revue systématique pour les athlètes, 2016, URL: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27924137/ (traduction française)
[8] Effets de la régulation du microbiote intestinal sur les symptômes d’anxiété: une revue systématique, 2019, URL: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31179435/ (traduction française)
[9] Bonaz Bruno, gastro-entérologue et hépatologue de l’hôpital de Grenoble.